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Première épître aux Corinthiens 11 / 26
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texte : Première épître aux Corinthiens, 11 / (23b-25) 26 (trad. : Bible à la colombe)
premières lectures : Jérémie, 23 / 5-8 ; épître aux Romains, 13 / 11-14
chants : 63-49 (Alléluia) et 310 (Arc-en-ciel)
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« Jusqu’à ce qu’il vienne… » Est-ce que vous savez quoi faire de cette affirmation, répétée quasiment à chacun de nos cultes, lorsque nous célébrons la cène ? Par ce verset de l’apôtre Paul, nous faisons de cette célébration autre chose qu’un mémorial, souvenir dans nos têtes et rappel à Dieu de cette mort en laquelle gît notre salut. Nous en faisons une annonce, pour nous qui l’entendons et pour les autres aussi. Une annonce de quelque chose à venir, une annonce de quelqu’un qui vient. Tout le sens de l’Avent est dans cette annonce, dans cette tension vers une venue dont il n’est pas encore le temps, paraît-il.
Cet Avent a beaucoup divisé les chrétiens, à toutes les époques – relisez les épîtres aux Corinthiens ou aux Thessaloniciens, vous le verrez déjà à l’œuvre dans les plus anciens textes de l’Église ! Certains se sont cru déjà arrivés, et cela s’est révélé catastrophiques pour eux et pour toute la société, sans compter les dommages faits à l’Évangile ainsi caricaturé. Ils avaient oublié que ce n’était pas de leur venue qu’il était question, mais de celle du Seigneur Jésus ! D’autres au contraire ont voulu tout vivre dans cette tension vers un demain encore lointain, parfois jusqu’à en calculer la date par d’improbables interprétations de certains textes bibliques. Aujourd’hui encore, les Adventistes du Septième Jour portent dans leur dénomination cette attente et, ce faisant, leur respect des anciens commandements…
Et même, puisque nous sommes rassemblés autour de la Table sainte, certains chrétiens communient avec du pain azyme – ainsi font catholiques et luthériens – tandis que d’autres – dont nous sommes ainsi que les orthodoxes – le font avec du pain levé. Simple tradition ou bien obscur dada ? Non point ! Le pain azyme évoque la Pâque juive, la sortie d’Égypte vers une terre promise mais non encore possédée, comme le rappelle Jérémie dans notre premier texte ce matin. Tandis que le pain levé évoque le repas eschatologique, la possession de ce que nous ne voyons pas encore. Chaque tradition ecclésiastique vit donc une articulation particulière entre, je dirais, la foi et la vue. Une manière particulière de concevoir l’Avent…
La Bible ne parle jamais de « seconde venue » de Jésus, mais « seulement » – si j’ose dire – de sa venue, sa « parousie » pour le dire en grec. Qu’attendons-nous alors ? Si nous n’attendons rien, si nous croyons que nous avons déjà tout reçu et que nous régnons dans ce monde avec le Christ, alors cette croyance, je vous l’ai dit, entraînera de gros dégâts ! Tous les extrémismes religieux et politiques ne sont-ils pas fondés sur une telle idée ? Ceux qui sont du « bon côté » font toujours régner la terreur sur les autres… Et si, conformément à de nombreux textes bibliques, malgré ou à cause de la première venue de Jésus, nous l’attendons, eh bien, en réalité, qu’attendons-nous ? Certes, pas notre salut ni la nouvelle alliance en Christ : cela est réalisé dans la mort de Jésus, c’est justement pourquoi nous célébrons baptême et cène !
Attendons-nous un grand jugement apocalyptique, au sens où toutes les mythologies nous l’annoncent ? Mais là encore, le jugement est déjà réalisé sur la croix de Jésus-Christ (Jean 3 / 18-19). Alors, je vais vous dire : nous n’attendons pas une seconde venue du Christ, mais nous attendons que sa première et seule venue change notre vie et notre monde. Pour ce qui est du monde, ne pensons pas que nous y serons pour quelque chose, quelle prétention ce serait ! Mais nous – je veux dire : chacun de nous, personnellement – oui, nous sommes concernés. En fait, c’est comme si c’était Jésus qui nous attendait, nous ! Comme si la venue n’était pas la venue du Christ Seigneur, mais notre propre venue non devant le monde, mais vers lui.
Et n’est-ce pas aussi ce que nous vivons lorsque nous entendons son invitation à communier ? « Venez, dit le Seigneur, car tout est prêt. » (Luc 14 / 17) Venue de lui vers nous, venue de nous à lui, mais c’est donc bien d’une telle rencontre qu’il est question, aujourd’hui et chaque jour de notre vie, cette vie que nous vivons dans l’absence du Dieu de Jésus-Christ non pas parce qu’il n’est pas là, mais parce que nous, nous ne lui sommes pas présents. Tant que nous vivrons ainsi, serait-ce avec des idées chrétiennes, nous devrons célébrer l’Avent, mais tant que nous vivrons ainsi, nous le célébrerons comme des païens, anticipant sur une fête de Noël qui tient plus de la mythologie scandinave que de l’Évangile. Jésus attend derrière la porte que nous venions lui ouvrir – là encore nous le répétons quasi à chaque célébration de la cène (Apoc. 3 / 20). Il a fait, lui, tout le chemin. Mais quant à nous, il nous reste effectivement à nous convertir, nous retourner vers lui au lieu de seulement avoir entendu parler de lui.
Car il n’est pas un mythe ni un souvenir du passé. Il est un souvenir de l’avenir. Il est là, prêt à nous recevoir, prêt à ce que son salut opère en nous, prêt à ce que son Évangile nous transforme, prêt à ce que son pain et son vin changent notre corps et notre âme. Nous célébrons la cène « jusqu’à ce qu’il vienne » ? Nous faisons bien. Nourris de cette attente, nous pouvons alors discerner sa présence – peu importe comment il fait ! Nous pouvons discerner qu’il vient pour nous, pour nous pardonner et nous changer. Et c’est maintenant. Amen.
Saint-Dié – David Mitrani – 27 novembre 2016