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Évangile selon Jean 17 / 1-9
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texte : Évangile selon Jean 17 / 1-9
premières lectures : Évangile selon Jean 12 / 12-19 ; Épître aux Philippiens 2 / 1-11
chants : 52-05 (Alléluia) et 734 (J’aime l’Éternel)
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Ah, la gloire, la gloire ! Ça nous titille… ! Au point que nous acclamons Jésus comme un sauveur glorieux, un chef de parti, un candidat à la royauté… ou à la présidence de la République ! Encore qu’aujourd’hui, jour d’élection, nous sommes quelque peu blasés et sans grande envie de chanter les louanges et proclamer la gloire d’aucun candidat, même de celui ou celle pour qui nous votons sans beaucoup d’illusions… Mais ceci est une autre question, n’est-ce pas ? Quoique… La grande manifestation des Rameaux a fait elle aussi beaucoup de déçus, mais pour d’autres raisons. C’est que le Roi acclamé avec des branchages, monté sur un âne comme le prophète l’avait annoncé (Zach. 9 / 9), est quelqu’un qui ne veut pas du pouvoir, contrairement à tant de gens qui ne vivent que pour ça, soit qu’ils l’ont, soit qu’ils le veulent – et ce à quoi nous assistons en Ukraine aujourd’hui en est une caricature, un extrême certes, mais une « bonne » illustration.
Jésus ne regarde pas à ce pouvoir terrestre, il n’aspire pas à la liberté au sens où nous l’entendons depuis quelques siècles dans notre culture, il n’aspire pas à décider tout seul de sa propre vie afin de la configurer selon ses propres désirs. Peut-être que nous aussi, certains d’entre nous, ou nous tous parfois, nous aspirons à cette autonomie, à nous « faire » nous-mêmes, à « gagner » nous-mêmes notre existence, en faire nous-mêmes quelque chose d’admirable, de glorieux. Au contraire, « Jésus leva les yeux au ciel », dit l’évangéliste au début du texte que je vous ai lu. Il s’en remet à Dieu son Père, il le prie et lui demande… quoi ? de pouvoir le glorifier, lui ! Et par quel moyen ? En lui donnant à lui la gloire… de pouvoir donner la vie éternelle à ceux qui le suivent. Pas une gloire pour en profiter soi-même. Mais la gloire de faire profiter les autres d’une vie qui sinon serait hors de leur portée. Une gloire pour les autres : pour le Père, et pour les disciples, pas pour lui.
Mais un disciple, qu’est-ce que c’est, en quoi ça consiste ? Nous devrions le savoir, bien sûr, nous qui, un jour, avons reçu la parole d’amour du Père en Jésus-Christ, avons été baptisés en elle, parole qui nous a été confirmée quand nous étions jeunes ou plus âgés. Mais souvent, l’impression que nous donnons à l’extérieur, c’est que cette vie de disciple consiste à venir écouter le pasteur un dimanche de temps en temps – tous les dimanches, pour certains – sur les bancs d’un temple. Eh bien non. Enfin… si, aussi ! ne partez pas ! Mais être disciple de ce maître si particulier qu’est Jésus, c’est lui appartenir, et reconnaître en lui, dans ses paroles, dans sa personne, la gloire de Dieu. Nous disons volontiers qu’ « à Dieu seul soit la gloire » (Jude v. 25). Nous chantons volontiers et par cœur « À toi la gloire, ô Ressuscité » … Mais nous n’en mesurons pas bien le sens.
Ça veut dire que nous reconnaissons que Dieu est le Créateur de l’univers – sans que cela implique quelque chose au niveau scientifique, bien sûr. Ça veut dire qu’il jugera le monde – y compris nous – en fonction de ce qu’il attendait de nous… Aïe aïe aïe… Et que vient faire Jésus là-dedans ? C’est qu’il est le contenu-même de la gloire de Dieu. La Création, œuvre du Créateur ? Nous ne le comprenons plus (Rom. 1 / 18-21). Le Jugement ? « Aucun n’est juste, pas même un seul » (Rom. 3 / 10). Alors le Père de Jésus a changé par rapport à ce qu’on croyait sur lui. Il nous a donné son Fils et il nous a donnés à lui. Rendre gloire à Dieu, quand on est disciple de Jésus, c’est voir Dieu en Jésus, l’homme mort et ressuscité, et le suivre, rester unis à lui. Or la gloire, qu’est-ce que c’est ? C’est ce qui a du poids. Nous disciples, pouvons-nous dire et confesser que Jésus a du poids dans notre vie ? Pouvons-nous reconnaître qu’il n’y a que lui qui pèse quelque chose dans et pour notre existence ? Alors nous saurons que c’est Dieu qui nous a créés, chacun de nous personnellement, et nous saurons que le jugement nous est d’ores et déjà évité. « Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse pas, mais qu’il ait la vie éternelle. » (Jean 3 / 16)
Mais comment cela se passe ? D’abord, Jésus a donné sa vie pour nous. Ce qui veut dire qu’il nous a donné sa vie, que nous l’avons reçue, et que nous pouvons en vivre, en profiter, comme d’un cadeau qui ne nous a rien coûté, mais qui n’en est pas moins précieux : à lui, ce cadeau a coûté, et nous le célébrons tous les ans pendant cette semaine qui commence aujourd’hui et que nous disons « sainte », et nous le célébrons tous les dimanches en partageant le pain et le vin qui nous le rappellent. Ainsi ce refus du pouvoir par Jésus, refus même d’avoir du pouvoir sur lui-même, nous a donné à nous le pouvoir de ne plus dépendre des nécessités qui obligent les autres humains : nous ne devons plus gagner notre vie, nous ne devons plus nous défendre, nous ne devons plus prolonger notre vie comme si la nature et la santé étaient nos dieux. Bref, nous sommes libres, y compris de donner notre vie à quelqu’un d’autre (le mariage devient alors « une aventure à vivre », comme disent les Éclaireurs unionistes, et non plus une obligation naturelle et sociale fondée sur le pouvoir et la procréation), libres de donner notre vie aux autres sans considérer notre propre intérêt, comme l’écrivait l’apôtre Paul, et même libres de « tendre l’autre joue » lorsqu’on nous frappe (Matth. 5 / 38-42).
Le but de notre existence de disciples de Jésus n’est plus de nous protéger, nous et les nôtres. Mais comme nous savons que lui nous a donné la vie éternelle, c’est d’en vivre un petit peu dès maintenant afin que sa gloire et notre liberté rayonnent sur les autres, ceux que nous croisons, ceux avec qui nous vivons ou travaillons. Alors nous manifesterons que la gloire de Dieu vaut mieux que la gloire que nous aurions pu acquérir par nous-mêmes pour nous-mêmes, comme déjà l’Ecclésiaste l’avait compris, dans l’Ancien Testament. La gloire, c’est ce qui pèse ? Or nous ne pesons rien dans aucune balance ! Sauf dans celle de l’amour de Dieu, parce que Jésus a mis, lui, tout son poids dans la balance, de notre côté ! Cela, chers amis, jeunes ou vieux, cela devrait nous suffire, et suffisamment nous motiver à vivre ensemble comme frères et sœurs en une même famille, tout comme à aimer ceux du dehors qui, sans Jésus, ne nous sont rien, mais qui, en lui, peuvent devenir le sens de notre vie, ceux à qui nous pouvons offrir cette vie sans rien attendre, puisqu’en Jésus, nous avons déjà tout ! Amen.
Saint-Dié – David Mitrani – 10 avril 2022