Évangile selon Luc 11 / 1-13

 

 

texte : Luc 11, 1-13

Le 22 mai 2022 à Saint-Dié

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prédication :

 

Chers frères et Sœurs en Christ,

Chers amis,

 

Les disciples ont besoin de recevoir un enseignement de Jésus sur la façon de prier. Est-ce à dire que prier ne serait pas si évident que cela ! Certainement.

Sur la forme de la prière, nous n’apprenons pas grand-chose puisqu’il nous est dit que Jésus lui-même priait un jour et en un certain lieu. La Bible donne des réponses très diverses quant au lieu : prier « sur une montagne, ou dans le secret de notre chambre, certains comme les pharisiens prient debout dans les synagogues et aux coins des rues pour être vus ».  Il est clair que l’essentiel concerne plus le fond que la forme et le lieu de la prière.

 

Que nous dit Jésus sur le contenu de la prière ? Et bien, il présente deux figures de Dieu qui mettent en évidence deux aspects de la prière.

 

La première figure de Dieu présentée par Jésus à ses disciples est illustrée par la parabole de « l’ami importun ».

L’un vient déranger l’autre en pleine nuit pour lui demander du pain. Souvent nous ne retenons que cette partie de l’histoire. Mais en fait ils sont trois ces amis.  Un premier arrive de voyage et vient demander du pain à un autre. Celui-ci s’empresse de se rendre chez un troisième en pleine nuit pour répondre au besoin du premier. Vous connaissez cette expression : les amis de mes amis sont mes amis. C’est bien ce qui est raconté dans cette parabole. Une question d’amitié en chaîne où règne une certaine fébrilité, une insistance à la limite de l’impolitesse pour répondre à un besoin.

La prière insistante telle qu’elle est présentée dans la parabole nous enseigne d’oser aller au-delà de ce que nous nous fixons habituellement comme limites dans nos demandes : ainsi nous pouvons tout exprimer à Dieu. Le fait de déranger en pleine nuit est le signe que notre prière peut aller au-delà des codes que l’être humain a établi pour sa vie ordinaire. Dans la prière c’est l’extraordinaire qui rentre dans nos vies : la puissance de l’Esprit qui nous amène à croire que l’impossible peut se réaliser dans l’ordinaire de nos vies ; l’énergie donnée pour demander en tout temps et en tous lieux que sa volonté soit faite même si à vue humaine cela paraît impossible. Peu importe le « comment » le « quand », c’est Lui qui sait.

Mais au-delà du caractère insistant, intempestif de la demande exprimée, on note aussi une notion de dérangement en cascade des uns des autres pour obtenir cette nourriture quotidienne. Cette forme de prière, de demande, provoque le dérangement d’une famille met en mouvement, favorise le décentrage personnel, fait apparaître un développement d’énergie de la part des amis concernés. Il faut dire que l’objet de la prière (dans ce cas) n’est pas personnel mais a pour origine la satisfaction du besoin de quelqu’un d’autre. On pourrait dire que la demande est motivée par le service à apporter à un ami. C’est ainsi que deux d’entre eux se retrouvent dans une forme de pauvreté solidaire qui leur donne l’audace de demander et, pour l’un, une forme d’audace en dehors de toute considération temporelle puisqu’il dérange en pleine nuit. Et ce dérangement porte ses fruits…non à cause de l’amitié mais justement à cause de l’attitude de celui qui demande sans se poser trop de questions ni sur la valeur, ni sur l’opportunité de sa requête. Dans tous les cas, il ne demande pas pour lui et cela suffit à obtenir une réponse.

 

La deuxième figure de Dieu présentée par Jésus à ses disciples est celle d’un Père auquel nous pouvons adresser tous nos besoins, toutes nos demandes qu’elles soient d’ordre matérielles ou spirituelles. Et si nous pouvons établir cette relation directe avec Dieu, c’est parce que lui-même vient d’abord à nous.

C’est le premier exaucement de notre demande que ce lien intime qui se créé avec et par Dieu et qui nous permet d’entrer dans la prière et de demander comme un enfant le fait avec son père terrestre. L’amour paternel basé sur la confiance favorise les demandes spontanées de l’enfant avec la ferme espérance d’être entendu et exaucé.

Alors ô combien notre Dieu, Père, saura-t-il répondre à nos demandes dans le sens où il sera à l’écoute pour qui demande, cherche, frappe.

Alors toutes nos attentes ne sont pas comblées me direz-vous… Certes, c’est Bonhoeffer qui disait : « Dieu ne comble pas tous nos désirs mais il tient toutes ses promesses ». La prière, exprimée à Dieu, ne relèvent ni du caprice, ni d’un contrat mais d’une relation de confiance. Nous croyons que Dieu répondra : comment et quand restent du domaine de l’incertitude. Mais nous savons que Dieu veut pour nous le meilleur même si nous passons au travers d’épreuves qu’il accompagne.

Jésus présente donc Dieu à ses disciples comme un Père et un ami qui se laisse déranger en toutes circonstances et qui accueille, reçoit nos demandes et pourvoit aux besoins avec bienveillance dans un temps qu’il ne nous pas donné de connaître.

 

Qu’est-ce que cela nous dit de l’enseignement de Jésus sur la prière ?

La prière est un élan salvateur vers Dieu dans le sens où elle nous fait sortir de nos propres ténèbres qui nous font nous replier sur nous-mêmes. C’est pourquoi la prière enseignée par Jésus se décline en « nous » et non pas en « moi » (« donne-nous chaque jour… pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons… »). Elan vers Dieu d’une communauté humaine qui comprend la nécessité de la solidarité, de l’entraide et qui a l’humilité de reconnaître que chaque individu ne peut agir seul dans son coin (c’est le sens de la parabole des amis).

 

La prière est l’expression de la foi de l’homme parfois chancelante, parfois vaillante. C’est bien la foi des amis qui les pousse à aller demander. C’est bien l’audace de la foi du second qui l’amène à déranger en pleine nuit. La foi en l’ami dont il se sent aimé et avec lequel il sait qu’il sera entendu.

 

La prière est accueil de l’inattendu que Dieu nous offre en réponse à nos demandes : inattendu d’une rencontre, d’une parole, d’un geste bienveillant, d’un regard qui peut changer beaucoup de choses dans nos vies. L’accueil de l’Esprit qui souffle où il veut.

Alors soyons audacieux dans nos demandes pour que sa volonté soit faite pour les autres et nous-mêmes avec la ferme conviction que Dieu, Père et ami, par le lien vivant de l’Esprit, écoute et agit.

Pour terminer, je voudrais partager avec vous ce texte d’un anonyme :

 

« J’ai demandé à Dieu la force pour atteindre le succès,

Il m’a rendu faible afin que j’apprenne humblement à obéir.

 

J’ai demandé la santé pour faire de grandes choses,

Il m’a donné l’infirmité pour que je fasse des choses meilleures.

 

J’ai demandé la richesse pour pouvoir être heureux,

Il m’a donné la pauvreté pour pouvoir être sage.

 

J’ai demandé la puissance pour obtenir l’estime des hommes,

Il m’a donné la faiblesse afin que j’éprouve le besoin de Dieu.

 

J’ai demandé un compagnon afin de ne pas vivre seul,

Il m’a donné un cœur afin que je puisse aimer tous mes frères.

 

J’ai demandé toutes les choses qui pourraient réjouir ma vie,

J’ai reçu la vie afin que je puisse me réjouir de toutes choses.

 

Je n’ai rien eu de ce que j’avais demandé,

Mais j’ai reçu tout ce que j’avais espéré, presque en dépit de moi-même.

Les prières que je n’avais pas formulées ont été exaucées.

Je suis parmi les hommes le plus richement comblé ».

 

Claudine Jacquey

 

 

 

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